Objet du mois : Allumer le feu, et faire danser les diables et les dieux

Objet du mois : Le fourneau

Allumer le feu, et faire danser les diables et les dieux

Les températures baissant, on se rapproche inexorablement de la cheminée, du poêle, du fourneau, du radiateur.

Si aujourd’hui, c’est chose relativement aisée, cela n’a pas toujours été aussi simple.

Notre langue regorge de termes qui font référence à l’âtre. Autrefois, on parlait de feu pour dénombrer le nombre d’habitant par maison et encore aujourd’hui on parle de foyer fiscal. Ne pend-t-on pas la crémaillère lorsque l’on emménage dans sa maison, la crémaillère étant l’élément indispensable pour faire à manger pour la première fois.

Dans les maisons les plus anciennes, on trouve encore quelquefois les vestiges d’une cheminée primitive. Celle-ci, souvent très sommaire, comprenait un foyer, avec une pierre au sol (dalle foyère) et une plaque au mur en partie verticale (le contre-cœur), rarement faite, chez nous, de fonte, elle est le plus souvent taillée dans de la molasse1, pierre résistante à la chaleur.

Le contre-cœur permet également de chauffer le mur mitoyen entre la cuisine, où se trouve le foyer, et le pèle (pièce secondaire), grâce à un petit placard mural.

Le foyer est ensuite surmonté d’un avaloir (hotte) soutenu par une poutre (la lande en Savoie), elle-même portée par deux pierres (les corbeaux).

Il est à noter, et cherchez l’erreur, que le conduit des cheminées était entièrement en bois…

L'arrivée du FOURNEAU

L’apparition du fourneau va, littéralement, tout changer dans les maisons jusqu’aux ustensiles de cuisine, exit, la poêle à longue manche utilisée pour cuire au sol.

« L’apparition du fourneau en fonte ne peut être datée avec précision […] Mais à partir du milieu du XVIIIe siècle va s’opérer lentement une révolution dans les modes de chauffage et dans la cuisson des aliments ».2

On peut remarquer pour la Savoie, que lors des visites de lutte contre l’incendie, suivant lettre patente du 11 août 1840, afin de  « désigner les réparations et rectifications à faire aux maisons des communes et les autres mesures à prendre pour prévenir les incendies »3 la plupart des maisons à Onnion utilisent à priori déjà largement le fourneau.

DIFFéRENTS TYPES

Au Musée PAYSAN, nous trouvons 2 modèles de fourneaux :

  • un fourneau à deux marmites dans l’espace « Alpage »

Légende : « Fourneau dit Octogone à deux marmites […] vers 1845. » Il semble que ce modèle ainsi que les fourneaux ovales à une marmite, soient les plus anciens. Ce type de fourneau à deux trous se retrouve fréquemment dans les chalets d’alpage, ayant laissé sa place dans la maison du bas à de nouveaux appareils plus performants, ils sont alors relégués à la montagne.

  • Un fourneau cuisinière dans l’espace « Le Pèle »

Légende : « Cuisinière M, à foyer devant et four de côté, à flamme renversée, à grille à barettes de côté » Nous retrouvons ce modèle dans le catalogue des Fonderies de Baignes chez Tiquet Fils pour l’année 1920, le temps passe et les modèles se rapprochent des pianos de cuisine que l’on peut trouver aujourd’hui dans les cuisines.

Saviez-vous qu’il existait des modèles réduits des différents fourneaux ? Ils pouvaient être à destination des enfants, qui sous forme de jeu découvraient l’utilisation de ce matériel, mais il n’était pas rare de les retrouver dans les vitrines de magasin, ils servaient de modèles de démonstration, tous fonctionnaient bien sûr !

Après avoir quasiment disparu des habitations, au profit du chauffage au fioul, le fourneau refait son apparition, mais sous une forme totalement nouvelle, avec le poêle à granulés ou encore à pellets.

Né aux USA en réponse au choc pétrolier de 1970, le premier poêle à pellets voit le jour en 1983, il répond parfaitement à la nécessité de réduire les émissions de CO². Le terme de pellet est un aller-retour entre le français et l’anglais, il désigne un comprimé ou une petite boulette (dictionnaire – le Robert).

Dis-moi comment tu te chauffes, je te dirais qui tu es !

1. Ce grès, appelé communément molasse, est une roche détritique verdâtre d’âge tertiaire (Chattien, -25 millions d’années) et constituée essentiellement de grains de quartz et de glauconie avec un ciment calcaire argileux. Quand elle s’altère elle prend une teinte jaunâtre : “[..]S’ils sont très sensibles au gel et dégel et aux pluies acides, les grès se sculptent facilement d’où leur emploi pour les encadrements des fenêtres ainsi que les embrasures des portes. Mais dans certaines régions, faute d’autres roches, des moellons ont été taillés dans ces roches pour construire des murs. Ce matériau servait aussi d’isolant. Dans certaines fermes haut-savoyardes, les aliments étaient conservés dans un espace entre deux murs en grès. Il servait également de pierre réfractaire dans les fours à pain ou au fond des cheminées”. Danielle Decrouez (brochure d’information). 

2. Fourneaux et fonderies de Haute-Saône. Joël Rieser & Jean Bauqueret.

3. Archives communales d’Onnion.