Objets du mois : Le fer à cheval et à boeuf
« Fer et des fers, c’est toujours travailler »
Le premier objet qui vient à l’esprit, quand on parle de forge, c’est indiscutablement le fer à cheval ou à bœuf. À eux seuls, ils réunissent, très souvent, les deux casquettes de cet artisan, un forgeron/maréchal ferrant. Il fabrique le fer puis le place sous le sabot de l’animal.
Le sabot du cheval n’est fait que d’un seul ongle et ne nécessite qu’un seul fer, contrairement aux bovins qui eux sont dotés de deux ongles ou onglons et de ce fait de deux fers par patte.
Le fer à boeuf
Le ferrage a pour but de protéger la corne de l’usure.
« L’usure est parfois si grande, qu’on a vu des bœufs, en troupeaux, par suite des marches forcées, avoir les chairs des pieds à nu, meurtries et déchirées quelquefois jusqu’aux os […] obligés de marcher pour approvisionner les armées en campagne »[1].
Il arrivait que l’on ne ferre les bœufs que sur l’onglon extérieur, probablement dans un souci d’économie, même si le ferrage d’un bovin coûte bien moins cher que celui d’un cheval. Il était courant faute de cheval ou de bœuf, de faire travailler les vaches laitières, elles permettaient ainsi d’avoir du lait mais aussi de travailler dans les champs.
Le fer à cheval
Chaque fer est différent et ne se place pas n’importe où ! Chaque chose à sa place, une place pour chaque chose. Les fers des pattes avant sont munis d’un seul pinçon (pointe métallique sur le devant du fer), les fers arrières, quant à eux, sont dotés de deux pinçons et sont plus arrondis sur l’extérieur du sabot, coté le plus sollicité. Certains fers sont recourbés à l’arrière, vers le bas, il s’agit de crampons fixes pour le travail dans les champs.
Le ferrage
Le sabot continue sa croissance durant toute la vie de l’animal et il nécessite un entretien fréquent. Le parage consiste à tailler et entretenir la corne. Il faut dans un premier temps retirer l’ancien fer, égaliser et réduire le sabot et enfin l’aplanir avec la râpe, le fer est alors retravaillé pour s’adapter au mieux à la forme du sabot, il est ensuite cloué.
Ce travail est très physique et impose que le cheval ne bouge pas trop, il convient d’utiliser « la mouchette » pour chasser les mouches et s’éviter un mauvais coup de pied.
Sur cette photo de Marcellaz, le personnage le plus à gauche actionne la mouchette (émouchoir).
Si l’animal est récalcitrant on prend, pour calmer celui-ci, un véritable objet de torture, « la moraille », sorte de pince avec laquelle on pince le museau du cheval et que l’on resserre toujours plus grâce aux crans.
Il existe un système encore plus archaïque « le tornè » (action de tourner en patois), il s’agit d’une boucle de corde qui enserre le museau et que l’on resserre à l’aide d’un morceau de bois enfilé dans cette même boucle.
Le fer porte-bonheur
Chacun sait qu’un fer à cheval cloué au-dessus d’une entrée, porte bonheur, bon nombre d’hypothèses se bousculent, quant à l’origine de cette croyance. Au milieu de toutes ces réponses, une légende se démarque, la légende de St Dunstan, saint Anglais.
Forgeron de métier, il aurait eu un jour la visite du diable qui se serait présenté chez lui sous la forme d’un voyageur, cherchant à faire rechausser son cheval.
Mais St Dunstan, loin d’être dupe, reconnu le diable et ferra celui-ci à la place du cheval. Submergé par la douleur, le diable supplia le forgeron de retirer le fer, ce que fit l’artisan, en ayant fait jurer au préalable au diable de ne jamais entrer dans une maison dont la porte serait surmontée d’un fer à cheval.
Drôle de souvenir
Digne d’un cabinet de curiosité, il est possible de découvrir, au détour de l’étal d’un antiquaire ou d’une brocante un souvenir hors du commun.
Le propriétaire d’un bon cheval, pouvait garder, après la mort de l’animal, un des sabots sur son fer, ici le sabot est marqué au fer des initiales « JC », peut-être le propriétaire.
Le sabot pouvait être transformé en objet du quotidien comme une tabatière ou encore un encrier…
[1] Ferrure du bœuf-M. Pierre Delbeuf-1867