objet du mois : L'uniforme de soldat
Effet de Mode ou adaptation aux conditions
en rouge et gris
Rouge garance et gris fer bleuté sont les couleurs de la tenue des soldats français lors de la mobilisation générale. Cette tenue est héritée de celle utilisée lors de la guerre de 1870, mais elle se révèle très vite inadaptée. En effet, elle était conçue pour être visible sur le champ de bataille enfumé par la poudre noire des canons et des fusils mais entre ces deux conflits a été inventée la poudre sans fumée par le professeur Vieille en 1884. Lors de la déclaration de guerre, l’état-major et le gouvernement français n’avait toujours pas réussi à produire un nouvel uniforme pour les soldats. C’est le 9 juillet 1914 qu’est voté l’adoption d’une nouvelle tenue basée sur un drap de couleur neutre dit tricolore consistant en un mélange par tissage des trois couleurs du drapeau français à savoir bleu, blanc, rouge. Ce tissage donnait une teinte grise au drap ainsi obtenu. Mais dès le début du conflit, l’alizarine, un colorant rouge fabriqué en Allemagne n’étant plus importé, le drap est confectionné seulement à partir de fil bleu et blanc et la tenue devient donc « bleu horizon ». Les pénuries dues à la guerre ont aussi une incidence sur les guêtres en cuir qui initialement étaient un élément de la tenue du soldat et vont disparaître progressivement au profit des bandes molletières déjà utilisées par les chasseurs alpins, les zouaves et les tirailleurs. La tenue complète du soldat en 1914 comportait en guise de protection pour la tête un képi, celui-ci sera remplacé par un casque métallique à partir de 1915, à la suite de l’alerte donnée par les services de santé concernant le grand nombre de soldats victimes de blessures à la tête.
Vous l’aurez compris, notre objet du mois de novembre est une tenue de soldat de la Première Guerre Mondiale. Cette tenue a été donnée aux Amis de l’Histoire, elle a appartenu à un gradé du 14ème corps de l’armée. Chaque corps d’armée correspond à une région militaire, le 14ème est celui de la région Rhône-Alpes. Lors de la déclaration de guerre, un corps d’Armée comprend environ 40 000 hommes dont 30 000 combattants répartis en deux divisions d’infanterie (27è et 28è) ; une infanterie de Corps d’Armée, une brigade d’Artillerie composée de 4 régiments, un régiment de Cavalerie, un bataillon de génie, des sections de services.
Zoom sur l'objet
De fabrication lyonnaise (atelier de confection Hubert de Vauthier et Fils), la tenue est celle d’un gradé. Cette dernière se distingue de celle d’un simple soldat à cause des bandes noires présentes sur le côté d’un des pantalons. L’uniforme donné aux Amis de l’Histoire possède deux pantalons, un rouge avec des bandes noires sur le côté et un autre pantalon uni. La veste des officiers est aussi différente car plus courte que celle des soldats. Cette tenue est un objet assez rare car comme expliqué plus haut la tenue est modifiée progressivement à partir de 1915. En effet, au début de la Grande Guerre les autres grandes puissances européennes avaient déjà adopté des couleurs plus discrètes pour leurs tenues de soldat ainsi qu’un équipement et un armement plus léger et fonctionnel.
La pénurie qui sévit dans les magasins d’habillement ne permet pas à tous les soldats de bénéficier de cette tenue, des modèles de képis simplifiés sont distribués aux troupes, des pantalons en velours côtelé marron ou bleu remplacent le pantalon réglementaire rouge Garance, même la capote (veste) est revue pour ne contenir plus qu’un simple boutonnage au lieu du double boutonnage.
l'uniforme du poilu en détails
En 1914, la tenue du soldat français est composée d’un pantalon rouge Garance, devenu le signe distinctif depuis 1829 et d’une capote (modèle 1877) gris de fer bleuté fermée par deux rangs de boutons. Le pantalon est enserré au niveau des mollets par
des guêtres en cuir lacées. Il est chaussé de brodequins en cuir avec semelles cloutées. Le ceinturon porte trois cartouchières en cuir et la baïonnette dans son fourreau. Le képi (modèle 1884) à turban garance et bandeau bleu, est recouvert, en campagne, d’un couvre-képi bleu. Le havresac est un sac de toile cirée renforcé par un cadre en bois sur lequel sont arrimés plusieurs équipements collectifs ou individuels, il pèse entre 25 et 30 kg, une musette en toile complète l’ensemble.
En août 1915, un nouvel uniforme bleu clair est adopté. La capote retrouve un boutonnage croisé qui protège davantage les soldats et les bandes molletières (2,60 m de long) remplacent les guêtres en cuir. Il est muni de poches renforcées pour stocker des munitions ou des petits objets. Cet uniforme, vite appelé « bleu-horizon », n’est pas généralisé avant l’automne 1916. Toutes les troupes métropolitaines et coloniales sont équipée de cette tenue sauf les troupes de l’armée d’Afrique qui reçoivent des tenues de couleur kaki tirant sur le jaune moutarde.
Le casque Adrian, métallique, commence à doter les unités à partir de septembre 1915 ; il est, dans les faits, perçu à partir de 1916 par l’ensemble des poilus. Il se compose d’une bombe métallique de 7/10e de millimètre d’épaisseur sur laquelle sont rivetés un cimier, une visière et un couvre nuque, un insigne d’arme complète l’ensemble métallique ; l’intérieur est doublé en cuir de mouton, des bandes d’aluminium ondulé assurent à la fois son maintien sur la tête et l’aération. Le nouveau casque est peint en gris artillerie, la couleur du canon de 75 ; il existe en trois tailles et pèse entre 670 et 750 grammes.
Tout au long du conflit, la tenue de soldat va évoluer en fonction des différentes phases de la guerre, des pénuries et du quotidien dans les tranchées.
Sources :
MUSÉE DE L’ARMÉE, fiche objet, espace première guerre, L’uniforme du fantassin français en 1914 et 1916.
fiche pédagogique, Uniforme des poilus : couleurs et matière dans la guerre des tranchées, auteur inconnu.
Crédits photos : PAYSALP, Musée de l’Armée, fonds Adrien Bonnefoy